Michel Moussa : Le Liban a atteint un stade élevé au niveau des lois relatives aux droits de l'Homme
Enquête : Rihab Abou Hosn
Traduction : Salwa Moussa/C.P.
ANI - Le monde arabe a célèbré, le 16 mars, la Journée arabe des Droits de l'Homme, sous le thème "Pour un Monde Arabe sans discrimination".
Ce thème a été spécifiquement choisi cette année suite au phénomène grandissant de discriminations de tout genre, notamment la discrimination raciale, éthnique, religieuse et sexuelle.
La discrimination contre les femmes vient en tête de la liste des discriminations raciales dans le monde arabe. Elle est suivie par la discrimination contre les étrangers et les immigrants, puis celle religieuse et enfin la discrimination éthnique, selon les divers rapports.
Le monde arabe est connu pour sa diversité culturelle, religieuse ainsi que politique de ses communautés. Cette diversité est une source de richesse si elle est bien exploitée. Sauf que les communautés arabes diffèrent de celles internationales, vu leur incapacité à accepter l'autre, notamment les personnes ayant une nationalité, une culture, un genre, une religion, une idéologie, ou même une origine géographique différente que la leur.
Par ailleurs, les experts rapportent que la majorité des problèmes relevant du racisme dans notre région est due à l'incapacité d'accepter son compatriote. Ce refus est accentué par la peur d'autrui, laquelle se manifeste par une attitude allant d'un simple préjugé défavorable à une attitude envahissant la vie quotidienne, cette xénophobie repoussant toute possibilité de dialogue et de communication.
Les médias et l'opinion publique jouent un rôle important dans l'alimentation de ses pratiques discriminatoires ainsi que dans le blackout qui couvre ces crimes, ce qui facilite l'impunité.
Cette dernière est surtout remarquée dans la discrimination contre les femmes. Lutter contre les différents genres de discrimination relève de la responsabilité des gouvernements, ont noté les experts, prenant en compte que l'égalité et la justice ne seront appliquées que lorsque les Etats aboliront les législations permettant les violations des droits de l'Homme et le non-respect des Pactes régionaux et internationaux.
Pour améliorer le mode de vie dans tout pays, il convient d'abord d'accepter l'autre et de respecter ses droits. Il devient alors vital d'entamer un dialogue honnête, qui se base sur la tolérance et qui regroupe toutes les composantes de la société, afin de promouvoir les valeurs et les principes énoncés par les diverses religions ainsi que les pactes régionaux et internationaux.
En outre, le fanatisme dans notre société arabe ne provient pas d'une idéologie religieuse mais des actions et décisions humaines. La foi appelle à l'ouverture envers autrui, à l'amour et au dialogue, tandis que l'extrémisme, notamment religieux, suscite la haine, la fermeture sur soi et l'ignorance. C'est pour cette raison que nous devrons oeuvrer à lutter contre le fanatisme qui s'est grandement répandu ces deux dernières années dans les pays arabes.
Les idéologies fanatiques qui ont envahi notre société nuisent à leur stabilité et menacent leur sécurité, d'où le recours à des programmes et des campagnes de sensibilisation intensives pour mettre les citoyens au courant de leurs droits et de leurs engagements, tout en braquant la lumière sur les avantages de la diversité dans toutes les communautés.
La commission arabe permanente pour les droits de l'Homme a recommandé, dans ce contexte, le thème
"Pour un Monde Arabe sans discrimination" vu le taux de discrimination dans cette région. Cette recommandation vient appuyer l'attention internationale veillant à la lutte contre le racisme et la discrimination.
Selon les comités, les centres de recherches et les associations civiles le monde est actuellement menacé par la montée de l'extrémisme.
Les citoyens arabes ont bel et bien appelé à combattre ce fanatisme, considérant cette lutte comme le seul et le meilleur chemin pour protéger les droits de l'Homme bien que les intérêts politiques de leurs dirigeants les ont guidés vers la violence et le confessionnalisme.
La commission parlementaire libanaise pour les droits de l'Homme a, pour sa part, fait tout son possible pour insérer des amendements dans les lois et les législations en ce qui concerne le dossier de la discrimination.
Le président de la commission parlementaire des droits de l'Homme, le député Michel Moussa, a affirmé à l'Agence Nationale de l'Information que la réalisation la plus grande de la commission serait l'adoption du plan national pour les Droits de l'Homme, qui fera suite à un travail de plus de sept ans. Ce plan, publié l'année dernière, traite les propositions nécessaires afin d'améliorer la situation des droits de l'homme au Liban.
M. Moussa a expliqué que ce plan avait pour but de réformer et de modifier les lois en vigueur afin qu'elles soient conformes à la Déclaration des droits de l'Homme.
" Le député Ghassan Mokheiber et moi-même avons présenté une proposition selon laquelle une commission nationale indépendante pour les droits de l'homme au Liban devrait être créée ", a-t-il confié.
Cette commission supervisera d'une manière indépendante les dossiers relatifs à la discrimination et aux droits de l'Homme au Liban.
Le député a fait remarquer que "le travail était en cours pour convaincre le Parlement à approuver la loi qui protège les femmes contre les violences", signalant que "la commission chargée d'élaborer cette loi a effectué des progrès et ce après 52 réunions".
"La commission a abouti à un premier jet qui devrait être présenté lors de la première séance plénière tenue dès la reprise des réunions des commissions parlementaires ", a-t-il affirmé.
Quant aux derniers incidents de violence conjugale au Liban, qui ont fait plusieurs victimes, M. Moussa a considéré que la situation exigeait l'approbation d'une loi qui protège les femmes le plus rapidement possible. Il a, dans ce contexte, demandé au Parquet d'accélérer les procès et de punir les coupables en attendant que ladite loi soit approuvée.
Le député a insisté sur le fait "qu'aucun pays ne respecte à fond les droits de l'Homme et qu'il y a toujours des raisons diverses, à savoir politiques, sécuritaires ou sociales, pour violer ces droits ".
"Que dire alors à propos d'un pays comme le Liban, qui subit régulièrement les répercussions des problèmes régionaux", s'est-il demandé, rappelant le problème des réfugiés syriens dont le nombre a dépassé le tiers des Libanais.
Cette complication vient s'ajouter aux incidents sécuritaires et aux troubles politiques intérieurs. Tous ces points négatifs nuisent au cycle institutionnel sur le territoire. Le Liban reste nonobstant meilleur que les autres pays de la région au niveau des droits de l'Homme, plus spécifiquement le respect des droits de la femme, mais cela n'empêche pas qu'il y a encore beaucoup de travail à faire à cet égard.
La commission des droits de l'Homme
La commission arabe des droits de l'Homme a doublé ses efforts afin de protéger les droits humains dans le monde arabe et d'éliminer les doubles standards ainsi que la politisation dans la résolution des dossiers relatifs à ce sujet.
A l'occasion de la journée arabe des droits de l'Homme, la commission a indiqué que la charte arabe des droits de l'Homme était le fruit du travail commun entre les pays de la région. Cette charte est conforme au programme des Nations Unies qui envisage la possibilité d'établir des accommodements régionaux dans le but de promouvoir et de protéger lesdits droits.
La commission a précisé que les pays arabes, en particulier les 14 pays ayant signé la charte arabe des droits de l'Homme, y compris le Liban, étaient responsables quant à la défense des droits et des libertés de tous sans discrimination.
Elle a aussi estimé que "la paix, la sécurité, le développement et les droits de l'Homme constituaient des principes liés les uns aux autres", assurant que "ces derniers reflétaient les objectifs de la charte puisqu'ils étaient la base de la sécurité régionale, le bien-être social et la prospérité économique".
"Célébrer la journée arabe des droits de l'Homme annuellement, le 16 mars, est une opportunité pour braquer la lumière sur les conditions des hommes dans le monde arabe. Elle permet encore de suivre de près la progression et la régression quant au renforcement et la protection des droits et des libertés évoqués dans la charte ", continue la commission.
Cette charte, rappelons-le, a été adoptée en mai 2004, à Tunis, lors du 16ème sommet de la Ligue des Etats arabes. Elle contient un préambule et 53 articles et reprend les droits traditionnellement garantis par les instruments de protection des droits de l'Homme tel que la liberté individuelle, l'égalité devant la loi, la protection contre la torture, la propriété privée ainsi que la liberté religieuse.
En outre, la commission arabe des droits humains est composée de sept membres élus au scrutin secret par les états ayant signé la Charte. Ces membres doivent avoir une grande expérience et compétence dans le domaine, afin d'exercer leurs fonctions à titre personnel en toute indépendance et impartialité.
Notons que la commission ne peut comprendre parmi ses membres plus d'un ressortissant par Etat; un tel membre n'est rééligible qu'une seule fois. Il est toutefois tenu compte du principe de l'alternance.
Les membres de la commission sont élus pour un mandat de quatre ans et sont munis d'une immunité afin de les protéger contre toutes les pressions morales et financières, et contre les poursuites juridiques dues à leurs positions ou même leurs déclarations dans le cadre de leur travail en tant que membres de la commission.
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